Découverte : les mécanismes de défense du poumon « en couleurs »

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Depuis le début de la pandémie de COVID-19, il est acquis que les infections au virus SRAS-CoV-2 peuvent entrainer des insuffisances respiratoires sévères. On ignore toutefois encore beaucoup des mécanismes à l’œuvre dans le poumon. Une étude des Cliniques universitaires Saint-Luc et de l’UCLouvain porte un éclairage sur ces mécanismes à l’aide des techniques d’immunofluorescence quantifiée.

Très tôt dans la pandémie de COVID-19, la littérature a mis en évidence la protéine ACE2 comme récepteur potentiel du Sars-Cov2 dans les cellules pulmonaires. L’hypothèse communément acceptée est que le virus envahit la cellule via ACE2, entrainant une diminution de son expression et une perte de son rôle protecteur contre l’inflammation et la fibrose.

Une équipe unissant les Services des soins intensifs et d’anatomie pathologique des Cliniques universitaires Saint-Luc ainsi que le laboratoire de pneumologie de l’IREC de l’UCLouvain a entrepris, grâce à un crédit de la Fondation Louvain, de sonder cette hypothèse dans le tissu pulmonaire et via des analyses sanguines complémentaires. Les résultats viennent d’être publiés dans la revue « American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine ».

La technique d’immunofluorescence consiste à marquer de manière colorée des protéines au sein même des organes afin de pouvoir les quantifier dans différentes populations de cellules (bronches, vaisseaux, alvéoles, etc.). Elle a été adaptée pour le poumon grâce à une technique mise au point à l’IREC.

Les chercheurs ont appliqué cette technique sur des fragments de poumon provenant de trois cohortes : des patients décédés du COVID-19 durant la première vague ; des patients présentant une insuffisance respiratoire liée à une cause autre que le COVID-19 (pneumonie, grippe, etc.) ; enfin, un groupe témoin avec des individus sans insuffisance respiratoire. De plus, l’expression de ces protéines a également été quantifiée sur les échantillons de sang provenant des mêmes groupes de patients.

Mécanismes de défense et perspectives thérapeutiques

Les résultats obtenus vont à l’encontre de l’hypothèse initiale, en mettant en évidence que la protéine ACE2 était plus fortement exprimée dans le groupe COVID-19 mais également, de manière également inattendue, dans la cohorte des insuffisances respiratoires hors COVID-19.

Autre observation : ACE2 (en jaune sur l’image) est plus particulièrement exprimée par les cellules endothéliales (cellules des vaisseaux sanguins, en orange ci-dessus), ce qui n’est pas le cas dans le tissu pulmonaire normal. Ces données suggèrent que la stimulation de l’expression d’ACE2 pourrait représenter un mécanisme général de défense du poumon lorsqu’il est le siège d’une inflammation intense.

Enfin, la recherche a montré que les cellules épithéliales du poumon (cellules recouvrant les alvéoles impliquées dans les processus de réparation du poumon ; en vert sur l’image) étaient détruites en plus grande proportion chez les patients atteints de COVID-19.

Les perspectives de cette recherche sont considérables. Détailler davantage ces mécanismes de défense et d’altérations cellulaires pourrait aider à développer de nouveaux traitements contre le syndrome de détresse respiratoire aigüe, quelle qu’en soit la cause. En outre, les observations réalisées à propos de la perte des cellules épithéliales pulmonaires ouvrent des perspectives intéressantes pour des thérapies plus spécifiquement contre l’atteinte pulmonaire liée au COVID-19.